Puits-canadien au Québec: trop dangereux et trop coûteux.
Puits-canadien au Québec: liens rapides au texte
Le principe du puits canadien
Le puits provençal en Europe
Pas rentable pour le chauffage
Questions de moisissures
Puits canadien vs VRC
Un système assez complexe
Applications commerciales?
Rafraichir ou climatiser?
Après 40 ans d’essais et d’erreurs, l’utilisation du puits-canadien pour le préchauffage et le refroidissement de l’air des habitations unifamiliales devrait être abandonnée au profit du ventilateur récupérateur de chaleur (VRC).
C’est mon opinion et elle est partagée par presque tous les vieux routiers de la construction écologique qui voient ressurgir le « miracle » du puits-canadien à tous les 10 ans par des écolos séduits par son apparente simplicité.
Le principe du puits-canadien
Un puits canadien est un tuyau enfoui dans le sol servant de prise d’air pour la maison. Faisant généralement de 30 à 40 mètres de longueur, le tuyau est enfoui à 2 mètres de profondeur pour réchauffer l’air entrant en hiver et pour refroidir l’air entrant en été à partir de la masse thermique du sol qui est à une température moyenne et relativement constante de 10’C à cette profondeur.
Au Québec, la température du sol à 2 mètres de profondeur varie de 5’C à la mi-mars à 14’C à la mi-septembre. Pendant ce temps la température moyenne de l’air extérieur varie de -8’C à la mi-janvier à 22’C à la mi-juillet.
Il s’agit donc d’un système géothermique actif (sol-air) où l’air est circulé à l’aide d’un ventilateur.
Le puits provençal en Europe
Il s’est fait très peu de puits-canadien au Canada contre plusieurs milliers en Europe et en Scandinavie. La légende raconte que ce sont des canadiens qui l’ont conçu en Provence durant la première guerre mondiale pour ventiler des abris souterrains. En Europe, on l’appelle le puits-canadien. Au Canada, on l’appelle le puits provençal. Mais au fond, il date des Romains.
En Provence, ce puits a surtout été utilisé pour rafraichir l’air en été. On sait que rafraichir l’air de seulement 5’C comparativement à la température extérieure permet d’atteindre une température de confort agréable lorsque l’air est sec. Ce puits permet d’atteindre cet objectif durant le long été provençal où l’air est sec et les canicules sont longues.
Pas rentable pour le chauffage
Un puits canadien bien conçu (bon diamètre, bonne longueur, bonne vélocité de l’air, bonne conductivité du tuyau) permet de baisser la température de l’air de 7’C en été et de réchauffer l’air de 7’C en hiver.
Rafraichir l’air de 35’C à 28’C fait toute la différence pour le confort, mais réchauffer l’air de -20’C à -13’C ajoute peu de confort aux maisons, vous en conviendrez.
Voilà le premier problème avec le puits canadien: il permet un rafraichissement naturel (pas une climatisation) mais il ne permet pas un chauffage naturel au Québec. Pour le chauffage, il n’est qu’un appoint permettant d’économiser 50$ par année pour un investissement de près de 3 000$ et plus.
Certains diront qu’en efficacité énergétique il n’y a pas de « petites économies » et que toutes les mesures sont positives. À cela, je réplique que l’argent peut être mieux investi ailleurs pour de plus grandes économies d’énergies.
Un apport inquiétant de moisissures et bactéries
Contrairement à la Provence, les étés du Québec sont chauds et très humides. Lorsque l’air chaud et humide arrive dans les tuyaux frais du puits, il se produit une condensation importante. Dans les pires moments de l’été, on estime cette condensation à 4 litres/hre sur un conduit de 40 m. Ces tuyaux, remplis de poussières et de spores de moisissures venant de l’air extérieur, deviennent des incubateurs à moisissures allergènes et toxiques, dirigés vers la maison.
Notre climat est plus près de la Scandinavie, où les chercheurs les plus sérieux recommandent de fermer le puits canadien durant l’été à l’aide d’une dérive automatique vers une prise d’air directe pour le VRC. Comme le puits canadien a un impact nul durant l’automne et le printemps, où les températures de l’air et du sol sont sensiblement les mêmes, il ne resterait que les minces avantages reliés au chauffage en hiver.
Certains argumentent qu’on peut mettre un filtre HEPA à l’entrée de l’air « frais » de la maison pour arrêter la contamination par les moisissures mais il s’agit d’un non sens technologique: ajouter de la mécanique, de l’entretien et des coûts pour contrer un problème inutile qu’on se crée soi-même. On est loin du gros bon sens.
Puits-canadien vs VRC
Pour le rafraichissement de l’air comme pour le chauffage, la première intervention à faire en économies d’énergies est d’isoler et de sceller l’enveloppe de l’immeuble (fondation, murs, toit, fenêtres) contre les infiltrations d’air.
Cette opération implique ensuite l’ajout d’un ventilateur échangeur d’air pour contrôler l’apport d’air neuf à la maison. Aujourd’hui, tout le monde convient que l’ajout d’un récupérateur de chaleur à l’échangeur d’air est très rentable. Un VRC performant est obligatoire dans toutes les maisons neuves du Québec.
L’ajout d’un puits-canadien à un VRC avec un noyau simple (70% de récupération) fait seulement économiser 50$ par année selon le chercheur Don Fugler de la Société canadienne d’hypothèque et de logement.
Personnellement, je prône plutôt l’utilisation d’un VRC à double noyau permettant la récupération de 90% de l’énergie évacuée par le changement d’air. L’investissement relatif au deuxième noyau est d’environ 600$ et vous fera économiser le même 50$ annuellement sans risque ni entretien supplémentaire.
Un système plus complexe qu’il ne semble
De plus, pour qu’un puits-canadien soit sain et fonctionnel, il doit respecter plusieurs critères:
– une vitesse de l’air supérieure à 1 m/s et inférieure à 3 m/s (demandez un ingénieur qualifié)
– une profondeur minimale de 2 mètres (excavation parfois difficile)
– une paroi lisse à l’intérieur pour réduire l’accumulation de poussières et d’eau stagnante (pas un simple conduit de plastique ondulé en PVC)
– des conduits de 20 cm de diamètre intérieur ( pour réduire la consommation d’énergie de votre ventilateur)
– une paroi ondulée à l’extérieur pour maximiser l’échange de chaleur
– une pente de 2 à 3% pour l’égouttement de la condensation
– des joints scellés contre l’infiltration d’eau et l’infiltration de gaz radon (attention aux tassements de terrains argileux, aux racines des arbres, aux rongeurs,…)
– un filtre à poussières à l’entrée (à nettoyer régulièrement)
– un système d’évacuation du condensat (condensation de l’humidité)
– une trappe d’accès (en cas d’obstruction)
– un tuyau préférablement de polypropylène ou à la rigueur de polyéthylène mais surtout pas de PVC, car le PVC sèche et se dégrade quand il est utilisé comme tuyau de ventilation.
Vous comprenez j’espère que je suis en total désaccord avec les compagnies de drainage qui utilisent:
– des conduits ondulés intérieur et extérieur
– de 4 pouces
– en PVC
– comme prise d’air
pour le pseudo préchauffage géothermique des maisons.
Applications commerciales et multifamiliales?
Je suis contre l’utilisation du puits-canadien dans la construction de maisons unifamiliales parce que je crains les problèmes de santé en cas de mauvaise installation ou de mauvais entretien et parce que les économies d’énergies sont trop faibles comparées aux risques et à l’investissement nécessaire.
Par contre, pour les applications multifamiliales, commerciales, industrielles et institutionnelles, c’est du cas par cas. Les ingénieurs en chauffage et climatisation sont équipés de logiciels permettant d’évaluer les opportunités qui se présentent en fonction des besoins et des performances recherchées. Le produit le mieux adapté à cet usage est probablement celui de Soleno. www.soleno.ca
Rafraichir plutôt que climatiser
Au Québec, on gèle même en été…lorsqu’on entre dans un cinéma, un centre commercial, des bureaux, des restaurants, et que la température frôle les 20’C. L’inconfort devient parfois un supplice lorsqu’on est à proximité d’une sortie de ventilation. On dirait que les gestionnaires d’immeubles n’ont aucune idée de la notion de confort.
Selon l’ASHRAE (American Society of Heating, Refrigerating and Air Conditioning Engineers), en été, 98% des personnes soumises à des tests de variations de température et d’humidité se sentent aussi confortables à 23,5’C avec 60% d’humidité relative qu’à 26’C avec 30% d’humidité relative.
Il suffit généralement d’une différence de 5’C entre l’intérieur et l’extérieur pour que les gens se sentent confortables.
Avec une humidité relative de 30%, le confort est acceptable entre 24,5 et 28’C.
Avec une humidité relative de 60%, le confort est acceptable entre 23 et 25,5’C.
Réduire la puissance de la climatisation ou augmenter la température de consigne est une façon simple et agréable de réduire sa facture d’énergie en été. Pour cela, la démarche première consiste à bloquer les rayons du soleil avant qu’ils entrent dans votre maison.
Yves Perrier
2015/11/05
À propos de l’auteur : Yves Perrier
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