Chauffe-eau solaire. Un rapport de 2012 du Laboratoire des technologies de l’énergie d’Hydro-Québec (LTE) sur les performances de 23 installations de chauffe-eaux solaires utilisant des capteurs plats démontre que leur utilisation n’a fait économiser en « moyenne » que 40% de la facture annuelle d’eau chaude domestique.

Pour le Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles du Québec le projet pilote n’a pas permis de démontrer la pertinence à grande échelle d’un programme d’encouragement à l’acquisition de chauffe-eaux solaires domestiques. C’est dommage car cette conclusion est basée sur une « moyenne » de systèmes mal conçus et mal installés utilisant les mauvais capteurs et des réservoirs trop grands.
Même les familles n’étaient pas représentatives de la moyenne québécoise.

Chauffe-eaux solaires: des capteurs mal installés

Une mauvaise orientation. Pour que des capteurs solaires thermiques soient efficaces on demande normalement qu’ils soient installés vers le Sud avec une variation de plus ou moins 15 degrés. Les capteurs analysés avaient des orientations variant entre (- 46 et + 60 degrés par rapport au sud). 10 capteurs sur 23 étaient mal orientés : une aberration.

Une mauvaise inclinaison. Pour que les capteurs soient efficaces on demande qu’ils soient inclinés de 45 à 55 degrés par rapport à l’horizontal. 4 des 23 capteurs avaient des inclinaisons moindres ou supérieures.

Chauffe-eau solaire: des systèmes mal conçus

Trois systèmes devaient permettre le chauffage des habitations en plus du chauffage de l’eau chaude domestique. La priorité allant aux chauffe-eaux, deux de ces systèmes n’ont rien apporté en chauffage des habitations et le troisième a fourni environ 286 kWh pour toute l’année (environ 22$). Le chauffage des habitations étant surtout nécessaire du début octobre à la fin mars l’utilisation de capteurs plats à cette fin était ridicule car les capteurs ne suffisaient pas au chauffage de l’eau domestique.

Des réservoirs trop grands. Les chauffe-eaux solaires certifiés par la norme CSA F379.1 présentent un ratio moyen de 58 litres par mètre carré de capteur. Dans le cas étudié, le volume de stockage installé chez environ la moitié des clients est égal ou supérieur à 90 litres par m.ca. et l’un d’entre eux atteint 115 litres/m.ca. Cette tendance au surdimensionnement des réservoirs tampons réduit la température de l’eau et l’apport solaire annuel.

Des capteurs solaires peu efficaces en hiver.

Les capteurs plats sont reconnus pour être inefficaces en hiver. Dans cette étude, tous les capteurs installés étaient des capteurs plats et leur efficacité moyenne du début octobre à la fin mars (6 mois) fut d’à peine 29%. Or, le rapport reconnait que les capteurs munis de tubes sous vide peuvent offrir un rendement supérieur à 50% durant cette période.

Des clients non représentatifs de la moyenne
Les 23 familles québécoises utilisant ces systèmes solaires étaient très économes en eau chaude. Elles ont consommé 25% moins d’eau chaude que les familles québécoises moyennes.
Le rapport explique que plus la consommation d’eau augmente et plus les chauffe-eaux solaires sont rentables. Les économies réalisées ne sont donc pas représentatives de la moyenne des familles québécoises.

Un hiver peu ensoleillé. Les tests ont été faits sur une seule année (2010-2011) et cette année-là, l’ensoleillement hivernal fut d’environ 10% moindre que la moyenne.

Une « moyenne » trompeuse
Lorsqu’on analyse les économies d’énergies des 23 installations on s’aperçoit qu’elles varient de 378 et 2084 kWh/an. En se basant sur la « moyenne » du groupe de 1215 kWh (ce qui se traduit en économie moyenne annuelle de 94 $) on en conclut à une piètre performance de tous les chauffe-eaux solaires au Québec. Or, compte tenu de la mauvaise conception et de la mauvaise installation de certains systèmes, ceux-ci auraient dû être éliminés de la « moyenne ».

Ces conclusions sont trompeuses sur l’efficacité réelle des systèmes bien conçus, bien installés et munis des bons capteurs. Avec de tels systèmes, on peut s’attendre à des résultats supérieurs pour les chauffe-eaux solaires au Québec.

Chauffe-eau solaire au Québec: un programme subventionné

Cette étude a aussi démontré que « pour faire une vente » ou par incompétence, les entrepreneurs spécialisés dans ce domaine n’hésitent pas à tricher sur les bonnes pratiques au détriment de la performance des systèmes.
Comme l’installation de ces chauffe-eaux était fortement subventionnée certains clients ont peut-être aussi insisté pour avoir une installation malgré les mauvaises dispositions de leur toit.
Voir le rapport complet du LTE au lien suivant: http://www.efficaciteenergetique.gouv.qc.ca/fileadmin/medias/pdf/solaire/Rapport_technique_Chauffe-eau_solaires.pdf

Le problème des chauffe-eaux solaires au Québec est celui de la rentabilité et de la durabilité des systèmes. Durant les grands froids, il fait presque toujours soleil et celui-ci pourrait réduire les problèmes énergétiques reliés aux heures de pointes. Socialement, cette technologie vaut encore le coût d’être encouragée.

Yves Perrier
2015-11-09